La France bloque l’extrême droite : elle doit désormais apprendre à gouverner en coalition

La France a appris deux choses ce dimanche soir : que le mur contre l'extrême droite est infranchissable pour ceux de Marine Le Pen pour le moment; et que le prix à payer est une division parlementaire sans précédent, masquée par des coalitions d’urgence aux idéologies très différentes qui ne s’accordent que sur une chose : un non catégorique à la droite populiste.

Le pays doit désormais défaire un nœud politique dont il n'a aucune expérience. Appliquez une géométrie variable parlementaire à laquelle vous n’êtes pas habitué. Inventez des alliances à droite et à gauche qui puissent soutenir un Premier ministre (celui proposé par le président) et un gouvernement sans motions de censure pendant au moins un an jusqu'à ce que des élections puissent être convoquées à nouveau.

L'Assemblée nationale française a été divisée en trois gros blocs. La première et la plus importante, celle de la gauche, vainqueur des élections législatives ce dimanche avec le Nouveau Front populaire (au moins 181 sièges sur 577, dont trois restent à attribuer à l'issue de cette édition). Le second, le centre-droit Juntos (166) d'Emmanuel Macron, qui résiste mieux que prévu au défi qu'il s'est lui-même lancé. La troisième, par surprise, celle de l'extrême droite du Regroupement national (143), qui a subi un cordon sanitaire républicain sans appel.

L'actuel premier ministre, Gabriel Attal, a déjà annoncé qu'il présenterait ce lundi sa démission au président Emmanuel Macron, même s'il restera en fonction. Macron doit proposer à la chambre basse un nouveau candidat pour former un gouvernement. À qui? Quelle fête? Il attendra que l'Assemblée nationale prenne les décisions qui s'imposent, selon le télégraphe de l'Elysée. C’est-à-dire voir s’il est possible de négocier une sorte de coalition qui atteint la majorité absolue (289 députés) ou qui reste proche.

Un gauchiste modéré ?

Plusieurs options sont sur la table. Un candidat de gauche, vainqueur des élections, mais issu du secteur modéré. L'ancien président socialiste François Hollande Il a gagné son siège de député. Sera-t-il l'élu ? Ce soir, il a insisté sur le fait que non… pour le moment. « Je ne suis pas candidat à la tête du gouvernement. Nous n'en sommes pas encore là », a-t-il assuré à la télévision BFM.

Il n’est pas facilement imaginable que Macron propose le politicien de gauche radicale Jean-Luc Mélenchon. L'actuel député et ancien président de La Francia Insumisa (LFI), qu'il a fondée, s'est empressé de se présenter devant les médias dès que les résultats des élections ont été connus. Le premier à prendre la parole semblait pressé de revendiquer la victoire de la nuit, bien qu'il ne soit ni porte-parole officiel ni leader du Nouveau Front populaire. Il est sorti au balcon et a été acclamé par une masse de ses électeurs. Il a demandé à Macron de nommer un Premier ministre de gauche.

Mais la victoire du Nouveau Front Populaire est de corail. Selon la répartition des sièges, sur les au moins 181 sièges remportés par le NFP : 71 viennent de LFI, 64 du Parti socialiste, 32 des écologistes et 9 du Parti communiste.

Macron, renforcé

À Macron à la fin L’avancée électorale surprise ne s’est pas si mal passée. Il a demandé aux Français de « préciser » s'ils souhaitaient que l'extrême droite gouverne, après avoir donné au parti de Le Pen une victoire éclatante avec 31% des voix aux élections européennes. La réponse a été non.

Mais en plus, sa coalition Ensemble, ils ont conservé la deuxième place, améliorant considérablement les prévisions.. Il est vrai que cela est dû en partie au fait que les candidats de gauche se sont retirés dans les circonscriptions où il y avait trois candidats, pour concentrer les voix. Mais le résultat final (encore une fois, à défaut de répartition de 16 des 577 sièges) est très digne : au moins 155 députés. La majorité, 95 ans, est issue de Renaissance, le parti de Macron. 34 du parti MoDem et 26 d’Horizons.

Ensemble et La Francia Insumisa (du NFP) sont comme l'eau et l'huile, elles ne peuvent pas être mélangées. Les socialistes quitteront-ils la coalition pour se mettre d'accord avec celle de Macron ? Avec les Républicains ? Tout est ouvert.

Le reste de l'Assemblée sera composé d'au moins 143 députés issus de Regroupement national et 43 de Les Républicains. Il existe également des groupes plus petits avec le reste des sièges.

Le grand perdant de la soirée au jeu des attentes a été le candidat du Regroupement National, Jordan Bardella. Il a dénoncé la « frustration » de millions de Français face à une coalition « contre nature » contre son parti. Une alliance « du déshonneur » qui l'aurait empêché de gagner et qui jette la France « dans les bras de l'extrême gauche de Mélenchon ». Il reste dans l'opposition. « La seule opposition possible à l'alternance », a-t-il estimé.

Les grandes coalitions laissent la place aux critiques extrêmes. Vont-ils sortir plus forts si un gouvernement à géométrie variable est formé ? Pour Marine Le Pen, c'est clair : cela ne fait que « reporter » sa victoire.